Alizée Agier : “On se sent serein quand on est accompagné.”

Crédit photo : Denis Boulanger/Fédération Française de Karaté

Présentez-vous.

Je m’appelle Alizée Agier, j’ai 29 ans et je pratique le karaté depuis l’âge de 5 ans. J’ai été championne du monde en individuel et par équipe et également championne d’Europe. J’ai été médaillée plusieurs fois à l’international et je prépare les championnats du monde qui arrivent très prochainement.

Pouvez-vous nous en dire plus sur votre discipline ?

Je pratique le karaté spécialisé en combat. Il faut savoir qu’au karaté, il y a la partie « kata » qui est technique et qui est un enchaînement codifié qui se fait seul ou par équipe. Le but, c’est de marquer plus de points que son adversaire en le touchant avec les poings et les jambes au-dessus de la ceinture. Il faut savoir qu’on ne cherche pas forcément le KO, on cherche la rapidité. C’est vraiment de la touche et de l’explosivité. Les poings nous rapportent 1 point, les coups de pied au corps rapportent 2 points et à la tête, 3 points. Il y a aussi des balayages qui nous rapportent 3 points. On a 3 minutes de combat et si jamais il y a 8 points d’écart, le combat s’arrête et on a la victoire. 

Pouvez-vous nous parler de votre maladie ?

En ce qui concerne ma maladie, je suis diabétique de type 1 depuis l’âge de 19 ans. Je l’ai appris d’une manière un peu particulière. J’ai vu mon médecin traitant qui, après une prise de sang lambda, a remarqué que mon taux de sucre était un peu élevé. Il a eu le bon réflexe de m’envoyer vers un spécialiste qui m’a dit que j’allais devenir diabétique, mais il ne savait pas quand. J’ai dû faire des prises de sang tous les 3 mois jusqu’au jour où, à 19 ans, je suis devenue diabétique. II s’en est suivi un traitement puisque mon pancréas ne produit plus d’insuline, une hormone vitale qui permet au sucre de passer dans le sang. Je dois donc m'injecter de l’insuline dès que je mange, en fonction de la quantité de glucides que je consomme. Il y a pas mal de paramètres à prendre en compte et c’est toute la complexité du diabète de type 1 au quotidien.

Quand j’ai appris que j’étais diabétique, ça faisait déjà 14 ans que je pratiquais le karaté. J’étais en Équipe de France et j’avais déjà eu de bons résultats avec l'Équipe de France Jeunes. J’avais déjà été vice-championne du monde Jeunes et championne d’Europe Jeunes. Je l’ai appris peu de temps après mon passage chez les seniors. J’avais 19 ans donc j’avais déjà un petit pied chez les seniors et ma carrière était déjà lancée dans le sport de haut niveau. J’étais dans la cour des grands, il fallait donc gérer le sport et le diabète et mener les deux de front. 

Quel est votre palmarès ?

J’ai été championne du monde 2014 en individuel, un an après être devenue diabétique. J’ai été vice-championne d’Europe 2017, plusieurs fois 3ème aux championnats d’Europe par équipe, championne du monde par équipe en 2016, 3ème aux championnats du monde en individuel et 2ème par équipe en 2021, 3ème aux championnats d’Europe en individuel et 3ème par équipe en 2022, 3ème par équipe aux championnats d’Europe en 2023. J’ai également eu des médailles aux Jeux Européens où j’ai été 3ème cette année [en 2023], aux Jeux mondiaux l’année dernière, en 2022, où j’ai été également 3ème. Pour finir, j’ai été aussi 6 fois championne de France.

Comment vous êtes-vous orientée vers le karaté ? Pourquoi le choix de cette discipline ?

Quand j’étais petite, je faisais de la gym, du karaté et du ski nautique. Je faisais beaucoup de compétitions, mais ça faisait beaucoup donc j’ai dû faire un choix. J’ai choisi le karaté naturellement. J’ai commencé le karaté grâce à mon grand frère qui le pratiquait également. Je voulais faire comme lui donc je me suis lancé.

Est-ce qu’il y a un sportif ou un entraîneur que vous admirez particulièrement ?

Je suis très admirative du parcours de pas mal de sportifs, notamment Clarisse Agbegnenou. Quand j’étais plus jeune, je ne connaissais pas l’existence de l'Équipe de France. J’ai découvert sur le tard l'Équipe de France et les grands karatékas et puis, j’ai eu la chance d’être bien entourée et bien entraînée durant toutes ces années pour aller au plus haut niveau.

Et maintenant, quels sont vos objectifs personnels dans le karaté ?

Je veux aller chercher un autre titre de championne du monde en individuel et par équipe sur les prochains championnats du monde. C'est le gros objectif. Malheureusement, étant donné que le karaté n’est plus présent aux Jeux olympiques, l’objectif, c’est d’avoir un titre aux championnats d’Europe qui se déroulent tous les ans, aux championnats du monde qui se déroulent tous les 2 ans et lors des grosses compétitions nationales et internationales comme l’Open de Paris et la Coupe de France. 

Êtes-vous déçue de ne pas voir le karaté aux Jeux olympiques de Paris 2024 ?

Oui, c’est une grosse déception et c’est dommage pour notre sport sachant qu’on a fait nos preuves à Tokyo. En plus de ça, on a Steven Da Costa, éblouissant, qui nous ramène le titre de champion du monde et qui n’a pas la chance de le défendre aux Jeux olympiques. On a vu que l’engouement était important autour du karaté quand c’est devenu une discipline olympique donc c’est évidemment une déception.

Pouvez-vous nous parler de votre double projet sportif et professionnel ?

Je suis athlète SNCF, j’ai la chance d’être entrée dans le dispositif en 2019. Il faut savoir que je terminais mes études quand j’ai passé les tests d’entrée pour travailler à la SNCF en tant que dirigeant opérationnel service à Paris Gare de Lyon. J’ai un emploi du temps aménagé qui me permet d’aller m’entraîner et d’aller en compétition et en stage. Ça me permet également d’avoir un pied dans le milieu professionnel. C’est important d’avoir ce lien professionnel pour nous sortir de cet univers très sportif et pour avoir un certain équilibre de vie. Ce n’est pas un accompagnement négligeable parce que quand on est sportif de haut niveau, on sait qu’une carrière peut s’arrêter rapidement et à tout moment donc c’est important d’assurer son avenir professionnel. En plus, ça se passe très bien depuis 2019 donc je suis très contente de ce dispositif.

Comment la Fondation du Sport Français vous aide avec son dispositif Pacte de Performance ?

Via le Pacte de Performance, j’ai la chance d’être soutenue par Sanofi. C’est un accompagnement important et puis, on se sent plus serein quand on se dit qu’on est suivi et que tout est bien encadré. Et c'est important de savoir qu’il y a des personnes qui sont présentes pour nous aider à chercher des solutions pour notre double projet de vie parce que comme j’ai dit, tout peut arriver dans une carrière sportive. Ça nous permet de prévenir les risques et d’être serein dans notre préparation sportive. C’est aussi très motivant.

Qu’est-ce que le Pacte de Performance vous apporte ?

Ça m’aide financièrement pour tout ce qui concerne l'achat de matériel et les dépenses pour la récupération qui peuvent être conséquentes au quotidien pour un sportif de haut niveau. Ça m’apporte également une sérénité, je peux avancer sereinement et me consacrer pleinement à ma préparation.

Qu’est-ce que vous avez pu entreprendre avec votre mécène Sanofi ?

J’ai effectué beaucoup de campagnes de sensibilisation autour du diabète de type 1 et des prises de parole. Il faut savoir que Sanofi est très impliqué dans la Journée mondiale du diabète. On fait beaucoup de journées de sensibilisation autour de la santé et c’est quelque chose qui me parle. Ça nous permet de motiver les gens, diabétiques ou non, à faire du sport et à prendre soin d’eux et de leur santé.

Vous avez sorti un livre “Le meilleur est à venir” dans lequel vous revenez sur votre parcours en tant que sportive de haut niveau, comment avez-vous eu l’idée de ce livre ?

J’aime bien lire et j’ai lu pas mal d’autobiographies. Je me suis dit que ce serait bien de mettre par écrit mon histoire. J’ai encore beaucoup de choses à vivre, mais je sentais que c’était le moment. C’était un peu un rêve, pour moi, d’accomplir ça. Je voulais surtout l’écrire pour moi-même et puis le proposer aux personnes qui seraient intéressées pour s’en inspirer ou pour mieux me comprendre.

En parlant d’inspiration, qu’est-ce que vous diriez à une personne diabétique qui voudrait faire du sport, mais qui n’ose pas forcément se lancer ?

Il faut y aller étape par étape, petit à petit. Quand j’ai appris que j’étais diabétique et que je suis retournée à ma première séance d’entraînement, j’ai pris le temps qu'il fallait pour me sentir à l’aise, pour être rassurée, pour redécouvrir le fonctionnement de mon corps. Il ne faut pas se démotiver et prendre le temps de comprendre tous ces changements. Une fois que cette étape est passée, qu’on a pris confiance et qu’on se sent bien, on voit tellement que le sport est complémentaire dans la gestion de la maladie. Le sport fait du bien à l’esprit et quand on a une maladie comme le diabète qui est omniprésent dans notre quotidien, les moments au sport nous permettent de penser à autre chose.

Crédit photo : Frédéric Mateu

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